Page:Champion - Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume, 1937.pdf/190

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
CATHERINE DE MÉDICIS

qui s’étend sur dix lieues, couverte d’herbes aromatiques, le thym, l’hysope et la sauge, pour aller coucher en Arles où l’on arriva le 16 novembre.

C’est ici une grande ville, célèbre par ses antiquités, les vestiges des Romains, et les arènes qu’ils avaient fait construire « pour jouer leurs comédies, en signe de leurs victoires », quand ils occupaient le pays.

Le roi dut séjourner vingt et un jours en Arles, car les « grandes eaux » du Rhône, furieux et débordé, assiégeaient la ville. On s’occupa de mettre en ordre les affaires de la Provence. Les habitants plurent à don Francès, qui les trouva « très bien », fort libres, entendant la messe avec la plus grande dévotion, et se montrant aussi très charitables. Les champs du pays d’alentour étaient agréables ; et Charles IX, le chasseur taciturne, prit plaisir dans la campagne à voir les hommes combattre et renverser, seul à seul, le taureau sauvage.

Catherine de Médicis, à son habitude, travaillait. Elle venait d’arriver en Arles quand l’amiral lui envoya dire que les insolences et les meurtres des papistes étaient tels qu’il apparaissait impossible de retenir désormais le parti des huguenots. Ils allaient s’armer pour se venger de ces outrages, ou bien mourir. C’est pourquoi Coligny demandait à la reine de porter, le plus tôt possible, remède à cette situation, en faisant un exemplaire châtiment des coupables.

La reine-mère avait retenu l’envoyé pour examiner d’abord… comment les choses allaient se passer en Provence. Les huguenots y réclamaient le droit de faire leurs prêches. Catherine de Médicis et le connétable Anne de Montmorency semblaient plutôt disposés à ne pas le permettre. Un grand débat se déroulait à trois lieues d’Arles, dans une assemblée très divisée et confuse. La reine y avait un observateur, évêque poète[1]. Quatre capitaines des réformés s’étaient présentés devant l’assemblée, la suppliant de ne pas rompre l’édit : « Si vous le rompez, vous devrez commencer par nos têtes, car nous mourrons tous en le défendant ! » Or, aux États du Languedoc, trois délégués seulement étaient d’avis de garder l’édit. Tous voulaient vivre et mourir comme leurs aïeux. Car aux hommes d’alors, qui ne pouvaient concevoir la coexistence de deux religions, l’édit paraissait un attentat contre la

  1. Et auteur de comédies, nous dit Francès de Alava.