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CATHERINE DE MÉDICIS

espagnole s’avancerait contre lui, elle ne ferait pas grand chose, car il s’était bien fortifié et pourvu de vivres. Don Francès rencontra dans une église le duc de Savoie. Ils parlèrent encore de la Corse. Le duc s’étonnait qu’on créât un tel ennui à Sa Majesté Catholique. Sampierro était prêt, selon lui, à donner tout ce qu’il avait gagné au roi d’Espagne, et disposé à réduire pour lui les gens de l’île. Voulait-il tromper l’ambassadeur, ou l’avait-on trompé luimême ? Le duc Philibert exposait que le catholicisme ne pouvait être sauvé que par Philippe II, sans quoi l’hérésie attaquerait ses propres Etats.

Don Francès lui fit observer qu’il ne lui appartenait guère de parler de la sorte, car lui-même ne châtiait pas les hérétiques, et il devrait bien commencer par extirper le mal dans sa propre maison. Philibert en convint : « Je fais comme les pêcheurs de baleines, qui avant de la tuer lui passent de longs filins, et la fatiguent jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus bouger ; et lorsqu’elle est à bout de forces, ils vont la recueillir. » Il ajouta que, si Philippe II le voulait, il pouvait tout arranger, même sans employer la force, car sa parole suffirait. Sur quoi le duc de Savoie monta sur son cheval, le piqua des éperons avec une telle fureur que don Francès ne put le suivre.

La reine-mère avait demandé à l’évêque d’Orléans, M. de Morvillier, esprit doux et subtil, et au président de Birague de venir lui parler le lendemain des affaires de la Corse. Ils montrèrent, comme le marque Francès de Alava qui les détestait tous les deux, la même sincérité que d’habitudel L’évêque avait dit :

Sampierro se trouve en Corse contre la volonté du roi. C’est un homme « désespéré » par les injustices que lui ont taites les Génois ; et certainement le roi serait en peine s’il perdait un si bon capitaine !

L’ambassadeur répondit : — Vu l’amitié et fraternité existant entre le Roi Catholique et le Roi très Chrétien, il est surprenant qu’on puisse tolérer à Marseille un homme séditieux avec sa galère, alors que dans le même temps le roi d’Espagne envoie une armée contre les infidèles. Cet homme a des intrigues avec ceux d’Alger et avec d’autres corsaires. Quant aux injustices commises envers ce pirate, j’ai vu D gitized by