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CATHERINE DE MÉDICIS

qu’on y avait rétablis faisaient dire à don Francès « de ne pas les laisser tous tuer ». Parpaille, auteur de la ruine a’Orange, eut la tête tranchée en Avignon. On voit qu’il n’était pas facile, même dans une principauté, de faire coexister la pratique de deux religions. Mais, comme tout est relatif, Orange semblait encore une cité assez belle, car cinquante maisons n’avaient pas été touchées par la maladie. Et l’ensemble valait bien deux mille écus de rente.

Le 23 septembre, Charles IX venait coucher à Sorgues, où l’on cultive les céréales et la vigne entre les canaux dérivés de la rivière. C’est là qu’il reçut, d’un « visage assuré », les clefs de la ville d’Avignon que vinrent lui présenter le vice-légat et deux habitants bourgeois.

Avignon était vraiment une cité heureuse qui, depuis l’an 1348, constituait avec son territoire un état particulier sous l’autorité directe des Souverains Pontifes. Ils y entretenaient un vice-légat, qui était une sorte de gardien supérieur, protecteur des libertés de la cité administrée par un conseil municipal réclamant peu d’impôts. Ainsi les Avignonnais vivaient tranquilles et catholiquement, sous le gouvernement de la Clef de saint Pierre, bien à l’abri du service militaire et des gabelles du roi de France. L’ensemble de la population formait trois nations : ceux qu’on nommait les citoyens, les bourgeois comme on disait ailleurs, nés en Avignon ; les Italiens, originaires de la péninsule, et enfin les Citramontains, venus de Provence, du Languedoc, du Dauphiné, et même des bords du Rhin. La banque était entre les mains des Florentins ; le commerce des draps appartenait aux Piémontais. La cité aux rues tortueuses et pleines d’ombre, aux traverses franchies souvent par des étages en encorbellement, était serrée dans les remparts de ses deux enceintes. Des placettes, ou planets, comme on disait, permettaient aux habitants de se retrouver autour des églises, nombreuses et fleuries, des puits et d’agréables boutiques achalandées, entre autres celles des orfèvres. La plus importante de ces places s’étendait devant le palais apostolique. Les faubourgs, entre les deux enceintes, portaient les noms des métiers exercés par des artisans : marché aux Herbes, aux Oignons, aux Cuirs, à l’Huile, au Fil, aux Raves, aux Fromages, au Poisson, à la Triperie, au Pain ; les boucheries et les charcuteries se tenaient dans un corps de bâtiment près de l’Hôtel de Ville. Des canaux contournaient les remparts de la cité avant de servir D gitized by