Page:Champion - Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume, 1937.pdf/149

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
135
EN DAUPHINÉ, L’ENTRÉE EN PROVENCE

en chassant le cerf, et malade avait dû rester pendant six jours au village de l’Estoile[1], on reprit la route. Le connétable semblait, lui aussi, assez fatigué ; c’est en bateau qu’il gagna Avignon, souffrant depuis plusieurs jours d’une colique tenace.

Une bonne nouvelle arrivait cependant, en cette époque calamiteuse. Le gentilhomme, envoyé par la reine-mère vers l’Empereur, avait été parfaitement accueilli par lui. Longuement ils avaient parlé ensemble, à la chasse et ailleurs. Les projets de mariage du roi Charles IX avec la fille de Maximilien, et de sa sœur, la petite Marguerite, avec le fils de l’Empereur, avaient été fort bien accueillis. Ainsi Catherine de Médicis obtenait ce qu’elle désirait particulièrement ; et l’envoyé de France ramenait une belle chaîne d’or de quatre cents écus.

Ces grands projets, l’union de la maison de France à la maison d’Autriche, contrastent singulièrement avec la gêne qui règne à la cour. Ce « faute d’argent » insupportable retarde parfois d’une mission à l’étranger, fait que les garnisons ne sont pas payées, ni nos alliés, les Suisses, qui ont tant de retard, tandis que les villes sont invitées à fournir des contributions. En un an, Paris avait payé un million sept cent cinquante mille francs, et le Dauphiné, en dix jours, trois cent mille francs. L’impôt était passé de trois à dix.

C’est de cette misère générale, plus encore que des passions religieuses, qu’était sortie la ruine du pays que l’on traversait alors ; il venait encore d’être dévasté par les partisans du baron des Adrets, alors huguenot, ou d’autres capitaines sortis d’Avignon, ceux-là catholiques, mais tous plus ou moins pillards, embusqués dans les fortins qui commandent, comme des burgs, la descente du Rhône.

Charles IX franchit la Drôme, fait son entrée à Loriol, traverse Dherbierres ; il arrive le 14 septembre à Montélimar, qui offre une entrée. Là on fit une halte de quatre jours. Montélimar était cette petite ville marchande d’où Montbrun était parti à l’attaque du Comtat Venaissin ; la maison du capitaine huguenot venait d’être rasée. Le 19 septembre, on passait à Donzère, vieux château crénelé accroché à la falaise. Le lendemain, Charles IX traversait Pierrelatte, dans la vallée élargie du Rhône, en face des monts du Vivarais. On déjeunait à Lagarde-Adhémar, le château du

  1. Il y fut le 12 septembre (Bibl. Nat., ms. fr. 25755).