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Quel est celui qui, jetant les yeux sur l’Océan troublé ou la bleue Méditerranée, s’aviserait de vouloir y bâtir une petite maison blanche à volets verts ?

Une fois entré dans ces flots d’harmonie souveraine dont Wagner a le secret, ne serait-ce pas d’un idiot que de demander un petit air de la Fanchonnette ?


La musique de Wagner me reporte à des époques lointaines où seul, dans un petit village normand, étendu dans les genêts sur la falaise, je regardais la mer toujours belle et toujours nouvelle, défiant l’ennui, et portant aux grandes pensées.


Il y a un côté religieux dans l’œuvre de Wagner, le côté religieux que vous laisse une forêt épaisse, quand vous la traversez en silence. Alors se détachent une à une les passions de la civilisation : l’esprit quitte sa petite boîte de carton où chacun a la coutume de l’enfermer pour aller en soirée, au spectacle, dans le monde ; il s’épure, grandit à vue d’œil, respire de contentement et semble grimper jusqu’à la cime des grands arbres.


Ce ne sont pas des phrases.

Mais comment rendre, sinon par des analogies de sensations, la langue mystique des sons enivrants ?


Cependant il faut essayer de faire comprendre à ceux qui ignorent, que la musique de Wagner n’est pas de la musique imitative.

Dans la symphonie des Saisons, Haydn a tenté d’indiquer « le passage de l’hiver au printemps. » Ainsi que celles-ci les paroles suivantes sont textuelles : « Les épais brouillards