Page:Chamfort - Maximes, Pensées, Caractères et Anecdotes, 1796, éd. Ginguené.djvu/15

Cette page a été validée par deux contributeurs.
vii
sur Chamfort.

Nicolas ; j’admire Chamfort. » Ils se virent quelques jours après ; & le maître & le disciple s’embrassèrent en pleurant.

Le train de vie que menait Chamfort depuis son entrée dans le monde, a des inconvéniens pour les hommes les plus forts : il en eut de très-fâcheux pour lui : sa santé reçut des échecs dont elle ne se releva jamais. Ses nerfs restèrent affectés ; des humeurs acres se jettèrent sur ses yeux, & firent perdre à son teint les couleurs brillantes, & la fraîcheur de la jeunesse, en même tems qu’une mélancolie profonde fanait & flétrissait en quelque sorte la fleur de son esprit.

Il était lié avec un nommé Waneck, riche Liégeois, qui retournant dans son pays, lui proposa de l’y emmener avec lui. Arrivés à Liège, ils se brouillèrent ; Chamfort, ou seul, ou avec quelqu’autre Liégeoise se rendit à Spa, & ensuite à Cologne, d’où il adressa à l’un de ses amis une fort jolie Épître en vers. De retour à Paris, il reprit le cours de ses travaux & de ses dissipations. Il concourut pour les prix de l’Académie ; mais moins heureusement que la première fois : son Discours philosophique en vers, intitulé : l’Homme de Lettres ; son Ode sur les Volcans furent présentés sans fruit au concours : deux années s’écoulèrent, & rien n’avançait pour sa réputation ni pour sa fortune.

Enfin il donna au théâtre la Jeune Indienne[1] dont le succès fut son premier pas vers l’une & l’autre ;

  1. En 1764.