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intérieur ne le consume-t-il pas, se dit-on? eh! com- ment le consmnerait-il? c'est lui qui le fait vivre. Donnez-lui une autre âme, et sa frêle existence va se dissoudre.

Hélas, mon ami! Tacite et vous, aurez donc toujours raison! c'est un étrange composé de lé- gèreté et de perversité que Ihomme, qu'il faut cependant servir et qu'on voudrait aimer : l'homme qui calcule les astres, qui soumet les élémens, qui défie et combat toute la puissance de la nature, qui peut tout excepte' conduire lui et ses sem- blables, qui a tout trouvé hors la liberté et la paix, qui a su donner l'autorité, qui a su l'endurer, et qui n'a su ni la diriger ni la seconder , qui sait ramper et ne sait pas obéir, qui sait se révolter et ne sait pas se défendre , qui sait aimer et ne sait pas s'attacher, qui a tous les contraires en bien comme en mal , dans le cœur et dans l'esprit. Votre ^mot est charmant. On a dit , il y a long- temps :

Mille fois ils m'ont tout promis ; Mais le siècle en fourhes abonde , Et je ne hais i ien tant au monde Que la plupart de mes amis.

Maisc'est-là l'épigramme chagrine d'un homme dont l'esprit aigri n'est jamais averti par son cœur. La vôtre ap[)artient à un pliilosophe qui a observé profondément , et qui donne ini résultat moral avec la gaîté et l'indulgence sans lesquelles il

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