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DE CHAMFORT.

Audite, quo mihi, ne offeratis, lavamini ! Et quel feu dans la seconde strophe ! Le prophète s’est à peine donné le temps de dire : nous serions comme les habitans de Sodome et de Gomorrhe ; qu’emporté par son indignation, dès la phrase suivante, il les traite de princes de Sodome , de peuple de Gomorrhe ; voilà la véritable marche lyrique. Enfin, quelle image plus belle peut montrer combien Dieu pénètre profondément dans le fond de notre âme, que celle-ci : Auferte malum cogitatiomun vestrarum ab oculis meis.

Éloignez de mes yeux vos coupables pensées.

Rousseau, dans ses Odes sacrées, a fait connaître David ; et tout le monde est à portée de juger combien il est rempli de traits du plus grand sublime ; c’est pourquoi je n’en citerai rien. Mais, disons en passant , avec Klopstock[1] , ce rival unique que l’Europe ait à opposer à Milton : « Qu’il ne suffit pas, pour un auteur qui travaille dans le genre sacré, d’avoir profondément étudié la religion, qu’il faut encore qu’elle ait formé son âme de cette main ferme, que l’homme de probité sait si bien reconnaître. » Cette pensée d’un homme de génie étranger est peut-être la plus grande réfutation des inculpations atroces faites au Pindare moderne.

  1. Voyez son Essai sur la Poésie sacrée, à la tête de son sublime poème du Messie.