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par la force de son expression et ia beauté de ses images. D'ailleurs , il est impossible de rendre mieux , ni plus fidèlement que notre poète, toute la première partie de ce dialogue. Le latin dit : Quid hahes y Esther? Ego swn J râler tuus , noli metuere. Et Racine :

Esther, que craignez-vous ? suis-je pas votre frère?

Et l'image de la colère de Dieu , substituée à celle de l'ange dans la bouche d'Esther , par le dévelop- pement que le poète lui a donné, acquiert aussi cette supériorité de force que toute la scène fran- çaise a sur l'expression naïve du livre sacré. C'est une chose digne de remarque que de voircombien Racine , même dans les détails de son plan , s'est peu écarté de la Bible. Presque toutes les scènes principales en sont tirées , comme celle où Esther adresse sa prière à Dieu, celle d'Assuérus que l'on vient de voir , celle d'Assuérus avec Asaph , celle où la reine divulgue le secret de sa naissance , etc. Ces entraves, que Racine a mises à son imagina- tion , n'ont fait qu'ajouter à sa gloire par le mé- rite de la difficulté vaincue , et ont donné aux poètes un modèle de la manière de traiter des sujets très-connus.

Quel dommage que le défaut principal que nous avons indiqué dans le caractère d'Esther, nous empêche aussi de nous livrei- à toute l'admiration qu'inspire la scène ou se développe l'action de

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