Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/353

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Belton.

Je le suis en effet pour avoir résisté
À cet amour si tendre et trop peu mérité.
(À Betti.)
Ah ! crois-en les sermens de mon âme attendrie !
L’indigence et les maux où j’exposais ta vie,
Seuls à l’abandonner pouvaient forcer mon cœur :
Même en te trahissant, je voulais ton bonheur.
Dût cent fois dans tes bras la misère, l’outrage,
M’accabler, m’écraser, je bénis mon partage.
Je brave ces besoins qui pouvaient m’alarmer.
Je n’en connais plus qu’un : c’est celui de t’aimer.
Je te perdais ! Ô ciel ! que j’allais être à plaindre !
(Il se jette à ses pieds.)
Voudras-tu pardonner ?…

Betti.

Voudras-tu pardonner ?… Ah ! tu n’as rien à craindre,
Cruel, tu le sais trop : ce cœur qui t’est connu
Peut-il ?…

Belton.

Peut-il ?… Chère Betti ! quel cœur j’aurais perdu !

(Ils s’embrassent.)
Mowbrai.

Ô spectacle touchant ! Tendresse aimable et pure !
L’amour porte en mon sein le cri de la nature !
Livrez-vous sans réserve à des transports si doux :
Je les sens, et mon cœur les partage avec vous.