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Il me perce le cœur par la main la plus chère ;
j’aime, et pour mon rival il a choisi mon frère.


LE PRINCE.


Cieux !


ZÉANGIR.


Ma mère en secret, j’ignore à quel dessein,
dans ce piége fatal m’a conduit de sa main.
Sa cruelle bonté, secondant mon adresse,
a permis à mes yeux l’aspect de la princesse ;
j’ai prodigué les soins d’un amour indiscret,
pour attendrir, hélas ! Un cœur qui t’adorait.
Je venais à tes yeux dévoilant ce mystère…
à Azémire.
cruelle ! Eh quel devoir, vous forçant à vous taire,
me laissait enivrer de ce poison fatal ?
A-t-on craint de me voir haïr un tel rival ?


AZÉMIRE.


Je l’avoûrai, seigneur, ce reproche m’étonne ;
l’ayant peu mérité, mon cœur vous le pardonne ;
j’en plains même la cause, et je crois qu’en secret
déjà vous condamnez un transport indiscret.
au prince.
vous n’avez pas pensé, prince, que votre amante,
négligeant d’étouffer une flâme imprudente,
fière d’un autre hommage à ses yeux présenté,
ait d’un frivole encens nourri sa vanité ;
et me justifier, c’est vous faire une offense.
Mais puisque je vous dois expliquer mon silence,
du repos d’un ami comptable devant vous,
souffrez qu’en ce moment je rappelle entre nous
quels sermens redoublés me forçaient à lui taire
un secret…