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que d’un frère à vos yeux j’ose occuper mon cœur.
Vous pouvez le haïr, je le sais…


AZÉMIRE.


Moi, seigneur !


ZÉANGIR.


Je ne me flatte point ; par lui seul prisonnière,
c’est par lui qu’Azémire est aux mains de mon père.
L’instant où je vous vis est un malheur pour vous,
et mon frère est l’objet d’un trop juste courroux.


AZÉMIRE.


Par mon seul intérêt mon âme prévenue,
à ses vertus, seigneur, n’a point fermé la vue ;
je suis loin de haïr un généreux vainqueur.
Ses soins ont de mes fers adouci la rigueur ;
il a même permis que mes yeux, dans son âme,
vissent… quelle amitié pour son frère l’enflâme !


ZÉANGIR.


Ah ! Que n’avez-vous pu lire au fond de son cœur ;
de tous ses sentimens connaître la grandeur !
Vous sauriez à quel point son amitié m’est chère.


AZÉMIRE.


Je vous l’ai dit, seigneur ; j’admire votre frère ;
je sens que son danger doit vous faire frémir.
Quel est-il ?


ZÉANGIR.


On prétend, on ose soutenir
qu’avec Thamas, madame, il est d’intelligence.


AZÉMIRE.


ô ciel ! Qui peut ainsi flétrir son innocence ?