Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/23

Cette page n’a pas encore été corrigée

DE CHAMFOR T. I 5

iiué; et je ne pense pas qu'on puisse raisonnable- ment en alléguer d'autres. Mais il n'en est pas de même d'une action mise en spectacle : c'est une autre sorte d'édifice, qui non seulement doit avoir une étendue beaucoup moindre que le pre- mier , mais encore qui ne peut souffrir qu'une mesure déterminée , pour ne pas rebuter le spec- tateur, obligé de le parcourir sans repos et sans interruption.

Il est donc naturel que la mesure de l'action ne passe pas de beaucoup celle delà représentation. Telle est la règle du bon sens que la réflexion fit naître à Eschyle , et plus nettement à ses succes- seurs, en considérant qu'une action représentée doit essentiellement ressembler à l'action réelle dont elle est l'image ; car, sans cela, il n'y a plus d'imitation, plus d'erreur , plus de vraisemblance et par conséquent plus d'enchantement.

Toutefois , comme cette ressemblance ne- sau- rait être toujours si parfaite, qu'elle n'admette quelque différence en faveur des beautés de l'art, l'art même, pour «lénager ces beautés, peut faire illusion au spectateur, et lui montrer avec su(?tès une action dont la durée exige huit ou dix heures, quoique le spectacle n'en emploie que deux ou trois : c'est que l'impatience du specta- teur, qui aime à voir la suite d'une action intéres- sante , lui aide à se tromper lui-même, et à sup- poser que le temps nécessaire s'est écoulé, ou que ce qui exigeait un temps considérable s'est pu

�� �