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ser trop aux petits intérêts des personnages subalternes ; voilà pourquoi Narcisse est si mal reçu dans Britannicus, quand il dit, en parlant de lui-même :

La fortune t’appelle une seconde fois.

On ne se soucie point de la fortune de Narcisse ; son crime excite l’horreur et le mépris : si c’était un criminel auguste, il imposerait.

CONFIDENS ET SUBALTERNES.

Les confidens, dans une tragédie, sont des personnages surabondans, simples témoins des sentimens et des desseins des acteurs principaux. Tout leur emploi est de s’effrayer ou de s’attendrir sur ce qu’on leur confie et sur ce qui arrive ; et, à quelques discours près qu’ils sèment dans la pièce, plutôt pour laisser reprendre haleine aux héros que pour aucune autre utilité, ils n’ont pas plus de part à l’action que les spectateurs.

Il suit de là qu’un grand nombre de confidens, dans une pièce, en suspendent la marche et l’intérêt, et qu’ils y jettent par là beaucoup de froideur et d’ennui. Si, comme dans plusieurs tragédies, il y a quatre personnages agissans et autant de confidens et de confidentes, il y aura la moitié des scènes en pure perte pour l’action, qui n’y sera remplacée que par des plaintes plus