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f aime .je ne puis plus supporter la chasse, il ne toucherait pas ; mais qu'il dise:

Mes traits , mes javelots , mon arc , tout m'importune ;

Voilà la pensée anoblie et rendue touchante.

Racine excelle dans l'art d'embellir son style par des images. Voyez avec quelle noblesse Aricie rend une idée assez triviale :

Pour moi , je suis plus lière , et fuis la gloire aisée D'arracher un hommage à mille autres offert , Et d'entrer dans un cœur de toutes parts ouvert.

Que de tableaux dans ce peu de vers !

Le style d'images est ce qui fait la différence de la poésie et de la prose ; il sert à exprimer les plus communes, d'une manière non commune ; il donne de la noblesse , delà grâce à tout.

Le st}le de sentiment est celui qui tire sa force et sa beauté, de la force même et de la beauté des sentimens et des pensées qu'il exprime. Ces pre- mières idées, qui naissent dans fàme lorsqu'elle reçoit une affection vive, et qu'on appelle com- munément sentiment, touchent toujours, quoi- qu'elles soient énoncées par les termes les pins simples.

Ils sont le langage du cœur. On ne s'arrête point à l'enveloppe ; les sentimens cesseraient même d'être aussi touchans, aussi sublimes , s'ils étaient

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