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DE CHAMFORT. I l5

rare étrangère que l'on donne aux sujets; mais cette parure , toute étrangère qii'elle est, est né- cessaire. Si Ariane n'était qu'une bourgeoise trahie par son amant et par sa sœur , la pièce qui porte son nom ne laisserait pas de subsister toute entière ; mais cette pièce si agréable y perdrait un grand ornement. Il faut qu'Ariane soit prin- cesse; tant nous sommes destinés à être toujours éblouis par les titres !

Les Horaces et les Curiaces ne sont que des par- ticuliers, de simples citoyens de deux petites villes ; mais la fortune de deux états est attachée à ces particuliers. L'une de ces deux petites villes a un grand nom , et porte toujours dans l'esprit une grande idée : il n'en faut pas davantage pour an- noblir les Horaces et les Curiaces.

Les grands intérêts se réduisent à être en péril de perdre la vie, ou l'honneur, ou la liberté, ou un trône , ou son ami , ou sa maîtresse.

On demande ordinairement si la mort de quel- qu'un des personnages est nécessaire dans la tra- gédie. Une mort est à la vérité un événement im- portant ; mais souvent il sert plus à la facilité du dénoùment qu'à l'importance de l'action , et le péril de la mort n'y sert pas quelquefois davan- tage.

Ce^qui rend Rodrigue si digne d'attention , est- ce le péril qu'il court en combattant le comte , les Maures ou don Sanciie ? Nullement : c'est la nécessité où il est de perdre l'honneur ou sa maî- IV. 8

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