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tout ce qui est étranger aux grands objets dont s’occupe la nation ; il trouvera des lecteurs, et les intéressera aujourd’hui comme il eût fait dans les temps les plus paisibles, et lorsqu’on était uniquement occupé de sciences et de littérature. Un voyage dans l’intérieur de l’Afrique éveille d’abord la curiosité ; et l’auteur de celui-ci ne tarde pas à faire naître un intérêt qu’il soutient jusqu’à la fin de son ouvrage. On sait que la navigation, qui de nos jours a découvert plusieurs côtes de ce vaste continent, n’a pu nous dévoiler l’intérieur de ces immenses régions où tout est nouveau pour nous, terres, plantes, hommes, oiseaux, poissons, animaux de toute espèce. On peut lui appliquer ce que M. le Vaillant dit de l’Amérique méridionale : « c’est le foyer où la nature travaille ses exceptions aux règles qu’on croit lui connaître. » L’Afrique lui parut le Pérou des naturalistes : il en a fait le sien ; il s’y est enrichi, et nous fait partager sa richesse ; il sait même la faire aimer par l’intelligence avec laquelle il en dispose, par le goût qui règne dans la distribution de son ouvrage. Il sait peindre, animer, varier ses tableaux : il parle tour-à-tour à la raison, au sentiment, à l’imagination. Nous entendons dire que son livre n’est pas assez savant. Le reproche peut être fondé ; car il est certain que le livre n’est point ennuyeux, condition requise, en plus d’un genre, pour être réputé profond. C’est à M. le Vaillant à confondre cette critique : et il paraît qu’il s’y