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DE CHAMFORT. l8l

frayer les esprits, faire redouter la révolution, et se ménager le prétexte plausible d’entourerParis de forces menaçantes, afin de le garantir du pil- lage.

Les commis des fermes, qui, au grand étonne- ment des financiers leurs commettans et du peuple jusqu’alors leur victime, se montrèrent de bons citoyens, avaient annoncé que, depuis quelques jours, il entrait dans la ville une foule de gens sans aveu. On ne voulut tenir aucun compte de cet a\ is. La police laissa les brigands s’attrouper, porter avec insolence l’effigie du ci- toyen dont ils détruisaient les possessions, et pro- noncer son arrêt de mort.

M. de Crosne, homme faible et indécis, esclave d’un ministère corrompu, et gardant par ambition une place supérieure à ses talens, ne se met nul- lement en peine d’arrêter le brigjàndage. Il répond que le guet à pied et à cheval a d’autres occupa- tions, et qu’il faut s’adresser au commandant des gardes-françaises. On fait vingt courses inutiles pour trouver M. du Châtelet ; enfin on réussit à le joindre. Il n’est point effrayé de tout ce qui arrive ; il va envoyer de puissans secours ; et ces puissans secours sont une poignée de soldats pour garder un vaste enclos, une maison immense, et pour faire face à une multitude innombrable de vagabonds effrénés, qui passent la nuit dans les tavernes, et se disposent, par des orgies, auK crimes commandés pour le lendemain. Le com-