L’apologue remonte à la plus haute antiquité ;
car il commença dès qu’il y eut des tyrans et des
esclaves. On offre de face la vérité à son égal :
on la laisse entrevoir de profil à son maître. Mais,
quelle que soit l’époque de ce bel art , la philosophie s’empara bientôt de cette invention de la
servitude , et en fit un instrument de la morale.
Lokman et Pilpay dans l’Orient , Ésope et Gabrias
dans la Grèce , revêtirent la vérité du voile transparent de l’apologue; mais le récit d’une petite
action réelle ou allégorique , aussi diffus dans les
deux premiers que serré et concis dans les deux
autres, dénué des charmes du sentiment et de la
poésie , découvrait trop froidement , quoique avec
esprit , la moralité qu’il présentait. Phèdre , né
dans l’esclavage comme ses trois premiers prédécesseurs , n’affectant ni le laconisme excessif de
Gabrias , ni même la brièveté d’Esope , plus élégant , plus orné , parlant à la cour d’Auguste le
langage de Térence ; Faërne , car j’omets Avienus
trop inférieur à son devancier; Faërne, qui, dans
sa latinité du seizième siècle, semblerait avoir
imité Phèdre , s’il avait pu connaître des ouvrages
ignorés de son temps , ont droit de plaire à tous
les esprits cultivés ; et leurs bonnes fables donneraient même l’idée de la perfection dans ce genre,
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PREMIERE PARTIE.