les gouvernés pour les gouvernans. Si le rêve des philosophes qui croient au perfectionnement de la société, s’accomplit, que dira la postérité, de voir qu’il ait fallu tant d’efforts pour arriver à des résultats si simples et si naturels ?
— Un homme sage, en même temps qu’honnête, se doit à lui-même de joindre à la pureté qui satisfait sa conscience, la prudence qui devine et prévient la calomnie.
— Le rôle de l’homme prévoyant est assez triste ; il afflige ses amis, en leur annonçant les malheurs auxquels les expose leur imprudence. On ne le croit pas ; et, quand ces malheurs sont arrivés, ces mêmes amis lui savent mauvais gré du mal qu’il a prédit ; et leur amour-propre baisse les yeux devant l’ami qui doit être leur consolateur, et qu’ils auraient choisi, s’ils n’étaient pas humiliés en sa présence.
— Celui qui veut trop faire dépendre son bonheur de sa raison, qui le soumet à l’examen, qui chicane, pour ainsi dire, ses jouissances, et n’admet que des plaisirs délicats, finit par n’en plus avoir. C’est un homme qui, à force de faire carder son matelas, le voit diminuer, et finit par coucher sur la dure.
— Le temps diminue chez nous l’intensité des plaisirs absolus, comme parlent les métaphysiciens ; mais il paraît qu’il accroît les plaisirs relatifs : et je soupçonne que c’est l’artifice par lequel la nature a su lier les hommes à la vie, après la