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que le hasard est un sobriquet de la Providence.

— Il y a peu d’hommes qui se permettent un usage rigoureux et intrépide de leur raison, et osent l’appliquer à tous les objets dans toute sa force. Le temps est venu où il faut l’appliquer ainsi à tous les objets de la morale, de la politique et de la société, aux rois, aux ministres, aux grands, aux philosophes, aux principes des sciences, des beaux-arts, etc. : sans quoi, on restera dans la médiocrité.

— Il y a des hommes qui ont le besoin de primer, de s’élever au-dessus des autres, à quelque prix que ce puisse être. Tout leur est égal, pourvu qu’ils soient en évidence sur des tréteaux de charlatan ; sur un théâtre, un trône, un échafaud, ils seront toujours bien, s’ils attirent les yeux.

— Les hommes deviennent petits en se rassemblant : ce sont les diables de Milton, obligés de se rendre pygmées, pour entrer dans le Pandœmonion.

— On anéantit son propre caractère dans la crainte d’attirer les regards et l’attention ; et on se précipite dans la nullité, pour échapper au danger d’être peint.

— L’ambition prend aux petites âmes plus facilement qu’aux grandes, comme le feu prend plus aisément à la paille, aux chaumières qu’aux palais.

— L’homme vit souvent avec lui-même, et il a besoin de vertu ; il vit avec les autres, et il a besoin d’honneur.