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destruction et par l'amour de sa tranquillité, IMais sa force n'a point de mesm^e fixe et constante : elle est asservie à mille hasards, à mille circonstances étrangères , qui peuvent ou la rendre OTimense ou la faire évanouir ; après avoir surmonté les plus grands obstacles, elle se trouve quelquefois arrê- tée par les plus petits ; elle peut échouer contre une opinion, un préjugé, luie mode. Le pouvoir peut employer tous les instrumens, tous les moyens actuellement existans ; mais il n'en invente point de nouveaux et ne peut préparer Tavenir. Il rend au siècle suivant Tespèce telle qu'il l'a reçue du siècle précédent , sans l'avoir perfectionnée. Il est plus puissant pour l'avilir ou poin* la détruire : en- core coinniande-t-il en vain à qui ne veutplus obéir. Homme furieux, arrêtez; ses droits sont sacrés! Mais que deviennent-ils, dans le fait, au temps de ces révolutions fatales, où les peuples, las de ty- rannie et d'oppression , reprennent dans ses mains leur force et leur volonté, tranchent leurs liens avec le fer, et redeviennent barbares, croyant se rendre libres?

L'action du génie est plus lente, maisplus forte et plus sûre; le mouvement qu'il a une fois im- primé, ne meurt point avec lui : il tend vers l'ave- nir et s'accélère par l'espace même (ju'il parcourt; il subjugue l'iiomme pour l'ennoblir; il dompte sa volonté par sa raison ,par les plus nobles de ses passions et de ses facultés ; comme Dieu, il jouit de rétf)nnant privilège de régner sur elle sans gêner

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