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état de la province.

Qu’il se rappelle lui-même que, quand on lui demanda si des institutions populaires seraient bonnes pour ce pays, il répondit, « c’est excellent ; » et en effet je le dis, c’est excellent.

M. Neilson : Ce n’était point là mes idées, je n’en veux pas.

M. Papineau : Vous avez au moins le mérite de les avoir inspirées,

E. Gugy : Je demande de bonne foi quelque tems pour me décider.

M. Bedard fait motion d’ajourner la discussion à un jour subséquent.

M. Papineau : Il serait bon de voter dès à présent les deux premières résolutions. S’il y a des membres qui croient pouvoir conduire leurs propres affaires et celles du public, il n’y a pas moyen de savoir quand nous pourrons commencer la discussion. Si la première résolution n’est pas adoptée, les autres tomberont par ce fait même. Si elle passe au contraire, le président pourra rapporter progrès. Je ne suis pas disposé à attendre que l’hon. M. pour le comté de Sherbrook nous dise : commençons à présent, je suis prêt ; et nous devons tout au plus ajourner d’un jour à l’autre. Si après ce temps on nous dit franchement qu’on ne s’est occupé que de ce sujet, et que 24 heures n’ont pas suffi pour en venir à une détermination, dans ce cas on pourrait peut-être condescendre encore à accorder des délais. Nous avons tous été sommés pour le 15, et ceux qui déjà sont prêts ont autant de droit d’avancer, que les autres ont droit de retarder. Ainsi en votant la première résolution, on ne se trouve pas engagé à voter les autres, (c’est une absurdité que de soutenir le contraire,) et l’on montre au public que l’on veut faire notre devoir, et que l’on comprend pour quel objet on est appelé. À une heure si avancée, je n’entrerai pas en réponse à l’hon. membre pour le comté de Sherbrook, cela reviendra dans le cours de la discussion.

M. Gugy : Je ne perdrai rien pour attendre.

M. Quesnel appuie la motion de M. Bedard.

M. Papineau observe qu’en effet il vaudrait peut-être mieux ajourner tout de suite, pour décider une question de privilége importante sous le rapport des principes. Il voulait parler de l’élection de MM. Chamberlin et Child. Il importait de décider cette question avant l’autre, afin qu’on ne vit pas voter sur l’état de la Province, un membre qui ne devait pas être dans la chambre.

La motion de M. Bedard passe unanimement.

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Mercredi, 19 février, 1834.

Mr. Neilson : Je pense que les membres ont eu occasion d’examiner les résolutions, et sont prêts aujourd’hui à prononcer sur leur mérite. Ces résolutions contiennent une atteinte à l’existence d’un corps constitué comme nous, en vertu de l’acte impérial de 1791 ; la mise en accusation du gouverneur en chef, qui forme aussi une autre branche de la législature ; le refus formel de subvenir par des appropriations d’argent aux dépenses de la Province ; et en outre, un procédé injurieux contre la Mère-Patrie, c’est-à-dire son secrétaire colonial. Il n’est pas nécessaire de dire que je ne puis voter pour de telles résolutions. Il me serait même impossible de le faire, quand ce ne serait qu’à cause des changemens qu’on veut apporter à l’acte constitutionnel. Toutes nos requêtes ont appuyé cette constitution, que la représentation du peuple a si vivement défendue lors du projet d’union, quand nos droits et nos privilèges étaient menacés. Chacun doit voir qu’à l’âge où je suis, je ne puis aisément changer d’opinion pour une constitution, que j’ai moi-même soutenue. Si je suis disposé à repousser toute attaque contre cette chambre, je suis disposé à en faire, autant pour le gouverneur, qui est le représentant du Roi dans ce pays. Il est vrai qu’il peut être mis en accusation par cette chambre devant le gouvernement impérial. Mais comment faire le bien commun, en s’attaquant au représentant du Roi ? N’est-ce pas nous mettre en inimitié avec les autorités, sous lesquelles nous siégeons, et déclarer qu’il n’y en a pas d’autres que la nôtre ? Il est de même contraire à mes principes d’arrêter la marche du gouvernement, en refusant de voter les subsides. Ce doit être la dernière ressource de la chambre. Si elle sait en faire un usage constitutionnel, elle amène le gouvernement à la raison, quand il s’en écarte. Mais l’usage inconsidéré de cette mesure en diminue l’effet, et détruit nos forces comme dispensateurs des deniers publics. Assurément je serai la dernière personne à consentir, qu’on s’emporte en injures, et en insultes contre celui qui nous communique les ordres de sa Majesté dans cette Province, et qui doit communiquer avec nous en notre qualité de corps législatif. Il est vrai que, comme législateurs, nous n’avons point d’ordre à recevoir de lui ; mais nous avons les règles de la décence à observer envers lui comme envers tous les autres. Dire que nous voulons rompre toutes communications avec lui, que nous jetons sous la table les dépêches de Mr. Stanley, sont des idées, que comportent les résolutions, qui jamais ne rencontreront mon assentiment. Je les rejette entièrement. Je sais que les affaires de la Province sont dans un état également nuisible pour cette chambre, le conseil, l’exécutif, et le public en général. Je sais qu’il existe un grand nombre d’abus, qui auraient dû être corrigés depuis très longtemps. Mais je suis d’avis que la chambre elle-même a négligé de faire ce qui était nécessaire pour cet objet. Nous avons en 1831 considéré l’état de la Province, et des résolutions ont été alors adoptées à l’unanimité. Elles ont été envoyées en Angleterre par le canal ordinaire du gouvernement : et peu de temps après le secrétaire d’état, nous a renvoyé une réponse, qui nous a été communiquée en 1832. Au lieu de recevoir cette dépêche, dans l’esprit qu’elle avait été écrite et qu’elle avait été dictée, on a poursuivi le projet d’un changement dans la constitution, et tenté de porter atteinte à l’existence d’une des branches de la législature, dont le concours est nécessaire pour donner force de loi à tous objets de législation. C’est nous qui avons mis ces entraves à la réforme des abus. Je prendrai la liberté de lire quelques extraits de cette dépêche, du Lord Goderich, datée du 9 juillet 1831. Et s’il y a quelque chose qui montre la libéralité de l’Angleterre envers nous, c’est sans doute cette dépêche. Voyons la. Nous nous sommes plaints dans notre adresse au Roi du 16 mars 1831, « que les progrès de l’éducation parmi le peuple ont été grandement retardés par la diversion des biens des Jésuites, destinés à cette fin. » Si ces biens n’ont pas été encore accordés, le principe a du moins été reconnu, et il n’a dépendu que de nous de les avoir. Voici quelques-uns des termes de la dépêche. « Le gouvernement de Sa Majesté ne nie pas que les biens des Jésuites n’aient été, à la dissolution de cet ordre, appropriés à l’éducation du peuple, et j’admets volontiers que les revenus de ces biens doivent être regardés comme inviolablement applicables à cet objet… Il est à regretter que ces fonds aient été appliqués à d’autres fins… Si l’assemblée était disposée à procurer des casernes aux troupes de Sa Majesté, tous les biens des Jésuites seraient affectés à leur véritable destination. » S’il arrive que par rapport à cet objet, quelque chose a été négligé, c’est à nous à faire des représentations en Angleterre, avec convenance et sans employer l’injure. Nous avons aussi représenté par la même adresse : « que la régie des terres incultes de la Couronne est vicieuse et injudicieuse, et gêne rétablissement de ces terres. » L. G. répond que, « ce sujet a occupé toute son attention, et qu’il se propose de répondre dans une dépêche séparée. » Cette dépêche