Page:Chambre d'assemblée du Bas-Canada, vendredi, 21 février 1834.djvu/37

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
état de la province.

en divisant les Canadas en deux Provinces. Pourquoi était-ce, sinon pour permettre à chacune de ces diverses contrées de défendre ses droits respectifs ? mais non pas jusqu’au point d’être aveugles sur les améliorations introduites par les étrangers, et de ne vouloir pas recevoir ses co-sujets d’Angleterre. Il a fallu bien de la malveillance pour oser dire le contraire ; quand toujours on a vu de la partialité en faveur des étrangers. Lorsqu’elle n’était pas avouée, on l’a tolérée. L’administration est passée outre à l’ouverture d’une session, elle a demandé des lois particulières pour une classe particulière, et ce qu’il y a de plus odieux et de plus damnable dans le conseil, c’est qu’il a eu la lâcheté de l’appuyer. C’est passé en principe que le conseil veut tout ce que l’exécutif veut. Cet abus exige absolument une réforme. Quel est le moyen de la faire ? Est-ce de donner encore au gouverneur le pouvoir de choisir les conseillers, après un outrage aussi sanglant fait à ce pays, en y appelant ces étrangers, comme s’il ne s’était trouvé personne dans ce pays pour remplir cette place. Mais il a trouvé dans le cœur de ces gens, bien indignes du rang qu’ils occupent, des sentimens conformes aux siens. Que ceux qui n’ont rien de Canadien, qui ne savent pas ce qui est juste et équitable ; que cette vile faction s’attache à ses doctrines ; qu’elle nous menace, elle ne nous fera pas fléchir. Qu’elle nous dise qu’elle nous déteste, qu’elle nous hait : nous lui répondrons que nous nous en réjouissons, et que nous la haïrons encore davantage. Mais il faut changer cet état malheureux de choses, sans redouter le tableau des dangers frivoles qu’on prétend y voir. Il n’y a rien à craindre pour ceux qui veulent le bien, dans ce siècle, et à la porte des États-Unis. Ce sont aux auteurs de nos maux, à les dévorer, à les avaler eux-mêmes. Nous ne devons pas concourir dans leurs odieux projets ; ils voudraient nous faire pendre, ou nous faire égorger, s’ils pouvaient. Ils nous ont reproché jusqu’à notre langue, comme si ceux qui possèdent les deux langues, qui puisent à cette double source, n’ont pas plus d’avantages que ceux qui ne puisent que dans une seule. Les connaissances des deux nations, dont on parle ici le langage, sont également étendues, et également essentielles à une éducation parfaite. On trouvera dans les publicistes anglais, dans les histoires parlementaires, dans les discours des Fox et autres, des maximes sublimes de droit et de liberté publics ; et celui qui n’a pas puisé à ces sources, s’est privé de grands moyens, et ne connaît pas tout ce que lui permet la loi publique, et jusqu’où elle lui permet de s’étendre : en sorte que les ennemis du nom canadien, qui veulent donner des bornes si étroites à la liberté anglaise, feraient bien mieux d’y aller lire. Il est donc essentiel d’y voir qu’elles sont les institutions qui nous conviennent, et qui ne puissent jamais nous être arrachées. Du moment que nous avons appartenus à l’Angleterre, nous avons eu droit à des institutions aussi démocratiques que les siennes. On a tenté de nous donner une aristocratie, et le système ne se trouve pas applicable. Y a-t-il parmi les masses un commencement d’affection pour le Conseil Législatif ! Si, lorsque quelqu’un est nommé conseiller, il était mieux vu, plus respecté, on pourrait dire que le principe commence à s’établir. Mais, je le demande, y a-t-il eu une époque, où la place de conseiller ait été recherchée, enviée ? Au contraire ne voit-on pas ceux qui y entrent, s’en retirer, n’oser y paraître, et avouer que c’est un opprobre pour eux d’y siéger, s’ils ont encore des titres au respect et à l’honneur de leurs concitoyens.

M. Stuart appelle à l’ordre sur ces dernières expressions ; et M. Gugy demande à faire vuider les Galeries. Après quelques momens le public a été de nouveau introduit ; et

M. Papineau a continué : je disais, quand j’ai été interrompu pour répondre d’un mot choisi au milieu d’une phrase, pour être mal interprété ; quand on a abusé de la règle de vuider les galeries, sous le faux prétexte qu’il y avait du bruit, (question sur laquelle ce n’est pas à nous à décider, mais à être jugés,) je disais donc qu’il fallait des changemens dans une branche de la Législature, qui tous les jours devient plus méprisable ; et qui a été la cause de nos maux depuis qu’elle existe. Est-ce dans ce moment, que tout le monde convient de ses défauts, et qu’un des membres, qui fait de l’opposition, est convenu qu’il fallait des changemens, qu’on voudrait nous faire prendre une marche rétrograde ; quand un homme, qui lui-même a presque abusé du système de réforme libérale, nous menace d’introduire des changemens propres à augmenter le pouvoir. Appelés à juger des actes du conseil, demandons-nous le ; qu’a-t-il voulu ? la spoliation de l’Isle de Montréal. De quelles personnes est-il formé ? de ceux qui ont demandé l’union. Quel sera le défenseur de ces gens qui ont voulu nous préparer un avenir si déplorable ? Dans ce moment que le développement du principe démocratique étend ses ramifications sur toute la face de l’Europe, resterons-nous stationnaires, et ne demanderons-nous pas des changemens dans le même sens, aux maux dont nous souffrons ? On fera voir d’avance que la force des choses est telle, que quand nous nous sommes exprimés, nous l’avons fait pour dire que nous serions de plus en plus libres. En effet, les colonies, qui se sont