Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/367

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monde ; sa joie, c’est de se mesurer « avec les bêtes sauvages et les hommes forts », il frappe en plein vol l’aigle farouche », et Kundry nous apprend que « brigands et géants, tous craignent la vigueur de son bras » ; il a oublié sa mère dans la seule joie de vivre ; il veut étrangler le messager qui lui apporte la nouvelle de sa mort ; sans armes, il réduit à merci les chevaliers du château enchanté de Klingsor. Voilà ce qu’est le héros du dernier drame de Wagner : rude à l’extérieur, mais non pas grossier (car la grossièreté est un des fruits empoisonnés de la civilisation), un héros batailleur et assoiffé d’action, dont le trait marquant est surtout une volonté indomptable et impétueuse.

Il est de toute nécessité d’insister là-dessus, parce que, malgré l’exposition, d’une transparente clarté, le caractère de Parsifal a souvent donné lieu à d’incroyables malentendus : en partie, peut-être, parce que les actes extérieurs, les combats, etc., ne peuvent, nous le savons, être représentés dans le drame wagnérien, mais seulement les moments de la lutte intérieure, les points critiques de la vie psychique, en partie peut-être, parce que, dans la conception un peu bien naïve de beaucoup d’hommes, il y a moins de force de caractère à fuir l’enchantement des sens pour voler au secours de l’humanité, qu’à faire justement le contraire : cela, ils l’appellent : « Froideur sans volonté » ; ceci, « indomptable énergie[1] ». Et pourtant les anciens poètes avaient bien reconnu la pureté comme un trait essentiel du caractère de Parsifal ; qu’on se souvienne, par exemple, combien charmante est la peinture que fait Wolfram

  1. Expressions textuelles de M. Max Nordau, dans un article sur Parsifal.