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« quelque chose de plus court et de plus facile » que l’Anneau. Et le maître écrivait à Liszt : « Tu le sais bien, je n’avais pas d’argent du tout, et quand Rienzi, à Weimar, me fit faux bond, je ne vis d’autre ressource que de faire, avec les Härtel « une affaire » ; pour cela, je choisis mon Tristan, à peine commencé, n’ayant rien d’autre sous la main[1] ; ils m’offraient de me payer cent louis d’or, soit la moitié des honoraires, fixés à deux cents, aussitôt après réception de la partition du premier acte ; et je me mis à y travailler d’arrachepied, pour en venir à bout. Et voilà la raison de la hâte, toute commerciale, que j’apportai à ce pauvre travail. » Ailleurs Wagner raconte comme quoi un message de l’empereur du Brésil, l’invitant à écrire un opéra pour la troupe italienne de Rio de Janeiro, avait eu « une assez vive influence sur la conception de Tristan ». Et on parle encore d’un amour passionné, qu’on prélendrait être la source profonde du poème et de la musique de Tristan, ce qui laisse sans réponse la question de savoir pourquoi un homme qui aura, en tout cas, aimé passionnément plus d’une fois dans sa vie, n’a pourtant écrit qu’un seul et unique Tristan… On voit combien vides sont ces combinaisons et ces rapprochements chers à la chronique. Les Maîtres Chanteurs furent mis sur le chantier vers 1861, à un moment où on eût attendu tout autre chose qu’une œuvre gaie, simplement parce que… parce qu’il s’était trouvé un éditeur pour les publier ! Parsifal, en 1805, parce que le roi Louis en avait exprimé le désir ; l’Anneau du Nibelung fut achevé, lorsque la construction du Fest-

  1. Ou, plus exactement, rien qui fût aussi avancé ; car le projet complet des Maîtres Chanteurs était terminé depuis longtemps, et, de Parsifal l’idée au moins se trouvait déjà nettement conçue.