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les détails d’une vie si remplie, j’ai cru bien faire en me bornant à une simple esquisse, à un croquis d’ensemble.

Une esquisse écrite, malheureusement, ne s’adresse pas à l’œil, qui, dans une esquisse peinte, peut d’un seul regard embrasser l’ensemble sous l’enchevêtrement des traits qui y concourent ; une esquisse écrite ne s’adresse qu’à la raison. Or la raison demande des formules, la pensée a besoin de points de repère. Ceux-ci, une fois nettement fixés, déterminent la formule à qui cette pensée pourra toujours revenir, pour se retrouver dans les complications ultérieures et pour leur assigner leur place. Il semble donc légitime de présenter une telle esquisse sous forme schématique ; et c’est ce que je vais tâcher de faire ici pour la vie de Wagner.

Mais ce n’est que par une classification toujours plus ou moins arbitraire que l’on peut dresser semblable tableau et y faire rentrer par tranches, en quelque sorte, le fouillis de fibres entremêlées dont une vie est la somme organique. Il ne faudrait donc pas attacher trop d’importance à un simple expédient de méthode, auquel le récit et les considérations que j’y joindrai enlèveront, je l’espère, ce qu’il pourrait avoir de trop absolu. Il ne s’agit, en réalité, que d’un échafaudage provisoire, qui pourra disparaître, une fois la construction achevée.

Rien de plus facile, au reste, que de trouver une formule générale qui résume la vie de Wagner : il y suffit presque d’une seule date et d’un seul chiffre.

Ce fut en 1813, en cette année mémorable où l’Allemagne, victorieuse à Leipzig, secoua le joug de l’étranger, que naquit Wagner, le plus allemand des artistes allemands. L’ennemi, cependant, en quittant l’Allemagne, laissait derrière lui beaucoup de son influence