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en ut mineur de Beethoven, car le motif ne tire sa vraie signification que du drame seul. Le motif musical sort par une floraison naturelle, — Wagner l’a démontré dans Opéra et Drame, — des motifs les plus importants de l’action tant qu’il reste lié à cette dernière ; sans elle il se dessèche et devient « squelette ». Que le musicien exercé et professionnellement cultivé étudie la technique de la structure musicale ; lui ne court aucun danger de tomber dans les rêveries, puisque, dès que l’exécution commence, son âme d’artiste s’affirme et remet tout au point ; mais gardons-nous d’attribuer à l’analyse logique dela musique une valeur qu’elle n’a pas ! Il faut aussi constamment se souvenir que Wagner n’a jamais fait de musique sur des mots, ou « composé des poèmes », mais que toute la trame symphonique de chacun de ses drames est bien l’atmosphère poétique où ce drame fut enfanté, grandit, mûrit, et que ce drame n’en sortit qu’achevé pour se produire enfin dans le monde, dont l’atmosphère eût été, pour lui, un poison.

Un exemple résumera ce que je viens de dire. Ce ne fut que des années après l’achèvement de Lohengrin que Wagner découvrit qu’il avait, dans cette œuvre, utilisé certaines phrases symphoniquement et à titre de motifs. Ainsi me semble-t-il que ceux qui veulent pénétrer plus avant dans le secret de ces œuvres ne devraient le tenter que peu à peu, en partant de l’impression générale que leur laisse une exécution aussi parfaite que possible, pour arriver aux détails de leur structure intérieure. Ici, d’ailleurs, ils n’auront jamais fini d’apprendre, car la perfection des formes et une richesse qu’auparavant on n’avait point soupçonnée offriront une inépuisable matière à leur admiration. Mais ce qu’il y a de meilleur et de plus pré-