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substance, en ce sens qu’il se saisit, selon leur valeur relative, des symboles mythiques que celle-là voudrait faire accepter dans leur sens littéral, pour en révéler dans une représentation idéale la vérité cachée et profonde. »

Ainsi le rôle décisif de l’art consiste en ce qu’il « sauve la substance de la religion » ; en ce qu’il « exprime ce qui est inexprimable pour la philosophie religieuse » ; en ce que, dans la dégénérescence du dogme, « le véritable art idéaliste intervient en libérateur » ; en ce qu’il « conserve le plus noble héritage de la pensée chrétienne dans sa pureté transformante, régénératrice ». Toutefois, si nous devons espérer en une régénération, encore faut-il que cet espoir puisse s’étayer sur la « restitution d’une religion véritable » ; car l’art seul ne saurait nous donner une religion. Il peut, cependant, nous mettre « sur la bonne voie », il peut nous « révéler l’ineffable au-delà de toute notion pensable » ; une intime parenté le lie à cette « religion suprême, qui doit encore sortir de la révélation chrétienne ».

Que, dans cette constante préoccupation de la religion, Wagner n’ait en vue aucune des églises existantes, cela saute aux yeux ; les derniers mots que je viens de citer, à eux seuls, le démontrent. Le lecteur a déjà pu se rendre compte, par beaucoup de passages cités dans ce livre, du sens dans lequel Wagner était chrétien. En 1851, il répond à ses adversaires : « Si je fus chrétien par mon désir de me soustraire à l’indignité du monde moderne, je fus un chrétien plus honnête que tous ceux qui, dans leur impertinente piété, me reprochent d’avoir abandonné le christianisme. » Il ajoute plus tard : « Nous ne devrions désormais nous appliquer qu’à préparer à la religion