renoncer à poursuivre maint développement contenu en germe dans sa doctrine, et, pour la même raison, a pu commettre quelques rares erreurs. Il est frappant, d’ailleurs, qu’à partir de ce moment, Wagner touche aux problèmes philosophiques moins qu’il ne l’avait fait auparavant ; partout, il présuppose Schopenhauer, et ne songe qu’à le continuer, que ce soit en matière artistique, ou dans le domaine social et religieux.
La connaissance de la doctrine de Schopenhauer n’est pas moins nécessaire pour comprendre en quoi Wagner s’en différentie que pour comprendre ce qui les rapproche. Ce n’est que plus tard, surtout vers la fin de la vie du maître, que ces différences s’accentuent, au moins dans leurs manifestations les plus importantes. L’espace me manque pour entrer dans de grands développements sur ce sujet ; qu’il me suffise, de renvoyer le lecteur à ce que Wagner dit lui-même dans Religion et Art, l’œuvre principale de ses dernières années.
Là, Wagner rejette le pessimisme absolu, et dit : « Une vue pessimiste du monde ne saurait se justifier, à nos yeux, que pour autant qu’elle se fonderait sur un jugement porté sur l’homme historique ; mais il faudrait y apporter d’importantes modifications, si l’homme préhistorique venait à nous être suffisamment connu, pour que l’on pût conclure, de sa nature même, à une dégénérescence intérieure, qui n’aurait pas été inéluctablement impliquée dans cette nature. » Qui veut savoir à quel point ce pessimisme historique diffère du pessimisme métaphysique de Schopenhauer, n’a qu’à se rappeler le passage du Monde comme Volonté et comme Représentation (Livre IV, § 53), où il est dit : « Car nous estimons que celui-là est à cent lieues d’une conception philosophique du monde, qui