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Zurich, nous ne trouvons que des points de contact très généraux avec Feuerbach, et nul point de contact qui soit d’une nature spécialement philosophique. Il y a plus et mieux : quand Wagner rédigea ces écrits où il se servait « avec une trop grande hâte des schémas de Feuerbach », il ne connaissait que fort peu de chose des œuvres de ce philosophe. Dans sa première lettre à l’éditeur Wigand (du 4 août 1849) lettre accompagnant l’envoi du manuscrit de l’Art et la Révolution, Wagner se plaint de ce que « il lui ait été impossible jusque là de se procurer, à Zurich, autre chose, des œuvres de Feuerbach, que le troisième volume, contenant les pensées sur la mort et l’immortalité[1] ». Wigand ne comprit pas, semble-t-il, cette innocente insinuation, car, un an après, Wagner pria Uhlig de lui faire enfin envoyer par Wigand les ouvrages de Feuerbach ; mais alors, l’Œuvre d’art de l’Avenir se vendait déjà en librairie. Nous savons donc de source absolument certaine que quand Wagner écrivait ses premiers ouvrages « révolutionnaires », et qu’il dédiait à Feuerbach l’Œuvre d’art de l’Avenir, il ne connaissait rien de ce philosophe que l’œuvre de jeunesse mentionnée plus haut[2].

Ce qui est arrivé ici au maître à l’égard de Feuerbach lui est arrivé plus d’une fois dans sa vie. Il a admiré Feuerbach de confiance. Ému par une des œuvres premières et des plus fortement pensées de ce philosophe, œuvre dans laquelle ce dernier déployait tous ses avantages

  1. Lettre inédite, autographe en possession de M. le Dr Potpischnegg.
  2. Ce fait qu’on avait jusqu’à présent ignoré, a, selon moi, une importance que l’on ne saurait méconnaître. En effet, on a cru, ou voulu prétendre, que Wagner était absolument sous l’influence de la pensée de Feuerbach.