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détourner de sa voie droite et personnelle, pour s’être confié à la direction de guides trop sûrs d’eux-mêmes. À cette époque, christianisme et gouvernement des prêtres lui semblaient être des termes synonymes. Mais le fait que, vingt ans plus tard, il comprit ces écrits dans la collection de ses œuvres, démontre bien qu’il ne voyait pas, dans cette opinion prématurée, une erreur proprement dite, mais plutôt un manque de mesure ou de clarté, fruit « d’une conception acceptée avec trop de passion », conception qu’il ne faudrait, dès lors, considérer qu’à la lumière de l’œuvre totale de sa vie. On peut, d’ailleurs, appeler L’Art et la Révolution : un pamphlet contre l’hypocrisie. Wagner y flagelle ce vice dans ses manifestations les plus diverses : l’hypocrisie dans l’État, dans la poésie, dans le drame, dans l’Église, dans le patriotisme, dansl’honneur ; car il a au cœur cette révolte, que Carlyle appelle désirable et nécessaire : « la révolte contre ceux qui gouvernent par le mensonge et contre ceux qui l’enseignent ». À plusieurs qui furent, à cette époque, en contact journalier avec lui, « il apparaissait comme un prédicateur de pénitence, acharné contre l’hypocrisie ». Et, il faut le reconnaître, un homme chez qui le sentiment religieux n’eût pas été réel et profond, et qui n’eût pas été convaincu, comme lui, que « la religion seule peut fonder la véritable dignité humaine » ne se serait pas laissé entraîner à appeler l’Église « menteuse et hypocrite ». Est-ce donc sans raison qu’il écrit que « Dieu s’est fait industrie au profit des riches… notre Dieu, c’est l’argent, notre religion, le lucre » ? Mais ne demande-t-il pas, dans les mêmes écrits, une religion vraie, qui ne soit pas celle de l’argent, pas « la religion régnante, celle de l’égoïsme » ? Ne dit-il pas que « l’œuvre d’art est la représentation vivante de la religion » ? N’est-ce