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Wagner, lui, prend au sérieux l’appel que ce même Schiller adressait aux artistes :

« La dignité de l’humanité est remise entre vos mains, gardez-la intacte ! avec vous elle s’abaisse ! avec vous elle se relèvera ! »

Wagner croit à la puissance et aux hautes destinées de l’art ; il veut annoncer au monde le message dont son cœur est plein. Pour le faire avec fruit, il est forcé de répéter jusqu’à la fin de sa vie que « pour l’art en général, pour lui donner dans le monde la position auquel il a droit, il faut d’abord lui assurer un terrain nouveau ».

Si nous considérons, dans ces chapitres, successivement : la Politique, la Philosophie, et la doctrine de la Régénération, c’est parce que cette division n’est pas seulement pratique et commode, mais qu’elle répond en outre à une série chronologique, et résume à grands traits l’activité littéraire de Wagner[1]. Non pas qu’il eût perdu de vue la politique lors que ses méditations se portaient plutôt sur la philosophie, ni qu’au cours des années une manière de voir plus spécialement religieuse eût remplacé chez lui celle du philosophe. En effet, nous retrouvons des aperçus importants, tant politiques que philosophiques, dans les derniers écrits du maître, et l’on peut dire que la pensée de la régénération se trouve déjà en germe dans les premiers de ces écrits ; mais les plans avancent ou reculent suivant l’époque de la vie, souvent aussi grâce à des circonstances accidentelles ou extérieures, et tel objet qui, à un moment donné, semblait absorber toute l’at-

  1. Quant au quatrième chapitre de cette partie, La Doctrine artistique, il doit être considéré à part. J’y ai résumé la pensée de Wagner telle qu’elle est exprimée dans l’ensemble de ses écrits, indépendamment de toute considération de chronologie.