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Pendant ces années de courses errantes, de 1859 à 1865, l’activité artistique de Wagner se maintint infatigable ; j’ai déjà mentionné les œuvres auxquelles il travailla, mais, détail très caractéristique, il n’acheva rien pendant cette période orageuse.

Le 10 décembre 1805, Wagner quitta Munich et se rendit en Suisse ; quelques semaines plus tard, il loua une maison isolée, bâtie sur une langue de terre qui échancre le lac des Quatre-Cantons, Triebschen. Dès lors, il n’a plus qu’une seule fois, en été 1868, fait représenter une œuvre de lui (Les Maîtres Chanteurs), à Munich même. Cette occasion exceptée, il a évité, dans la mesure du possible, la capitale bavaroise ; les représentations de Rheingold et de La Valkyrie, peu après, ont été données sans sa participation.


3. — 1866-1872.


Le bonheur n’a pas d’histoire. On peut dire que les six années que Wagner passa à Triebschen, du printemps de 1866 au printemps de 1872, furent, peut-être, les plus heureuses de sa vie, mais que ce furent aussi celles dont, en un certain sens, il y a le moins à parler.

Comme Wagner l’avait dit de Weber, on sent ici le besoin de « soustraire le grand homme aux regards de l’admiration, pour le remettre aux mains de l’amour ». Si l’on veut jeter un coup d’œil dans le cœur du maître à cette époque, qu’on écoute son « idylle de Siegfried (Siegfried-Idyll) ». Cette musique est la page la plus significative de l’autobiographie de Wagner. Qu’on se rappelle aussi les trente années précédentes de sa vie : en 1836, il était à Magdebourg, et au printemps eut lieu cette néfaste représentation