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— des pains et des cervelas. On se battait fort pour attraper de la victuaille ; on se battait parfois jusqu’au sang, après s’être roulé dans la poussière.

Par delà ces tribunes, un spectacle non moins repoussant s’offrait aux regards. De petits ruisseaux de vin ne cessaient de couler au moyen de tuyaux pratiqués à cet effet. Une masse de populaire se culbutait. L’un grimpait sur l’épaule de l’autre, et tous s’élançaient vers les tuyaux, avec des seaux, des brocs, des cruches, ou des éponges, pour y recevoir le jus de la vigne. Quand, à la force du poignet, après des assauts réitérés, ils étaient à la fois inondés de vin et meurtris, ces ivrognes s’en allaient boire à l’écart, jusqu’à ce que le sommeil vainquît les victorieux. Les vieux et les jeunes luttaient à qui boirait davantage, et des scènes profondément sales s’ensuivaient.

Ces divertissements, indignes d’un peuple qui se respecte, cessèrent sous Louis-Philippe.

On s’en tint aux distributions de comestibles aux indigents ; on s’en tint aux spectacles gratis, aux feux d’artifice, aux revues, qui attiraient les marchands de coco, les vendeurs de petits drapeaux, outre les débitants ayant dressé leurs tentes au Champ de Mars ou sur les boulevards, de la Madeleine à la Bastille.