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Nourrit, qui s’était retiré devant lui, malgré nos instances pressantes.

Les débuts de Duprez, dans le rôle d’Arnold, ont laissé des souvenirs profonds. Quelle soirée ! quelle salle impatiente ! Nous, qui étions les partisans, les amis de Nourrit, qui lui avions jeté des fleurs lors de ses dernières représentations, nous brûlions du désir de siffler le nouveau ténor, et nous le déclarions bien téméraire d’oser remplacer celui dont la belle et expressive figure, dont l’entrain et les élans nous ravissaient naguère.

On voyait les habitués de la « loge infernale » — Véron, Malitourne, de Boignes, Émile de Girardin, Chégaray, etc. — s’agiter démesurément, prêts à user de leur grande influence contre Duprez.

L’ouverture s’achève, et le public applaudit avec mollesse. L’apparition du ténor, petit, tout en poitrine, à figure moins que poétique, produit un froid dans le parterre. De légers chut ! se font entendre, avant qu’Arnold ait accentué son premier récitatif d’une façon magistrale. Les auditeurs hésitent ; mais des bravos éclatent déjà, se renouvellent peu à peu, soit pour les duos avec Mathilde, soit dans le trio avec Guillaume et Melcthal. Enfin, la salle entière est gagnée au débutant, lorsqu’il chante le morceau : Asile héréditaire, la perle de son écrin.