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créateur de Vautrin et de Quinola frisait le bohème, du moins jusqu’au moment où il habita son petit hôtel de la rue Fortunée. Ceux qui prétendaient avoir « acheté son fonds », exagérèrent son débraillé, et inventèrent le « réalisme », qui bannissait tout idéal.

Sur la scène de l’Odéon, où éclatèrent les plus beaux triomphes dramatiques comme les plus désopilantes chutes de l’époque, les Ressources de Quinola furent outrageusement sifflées par le public, non pas seulement à cause des défauts de la pièce, mais en punition des procédés de l’auteur, lors de la première représentation.

Balzac avait acheté tous les billets au directeur, et il fallut s’en procurer rue de Vaugirard, où ils se vendaient le plus cher possible.

Cette spéculation ne réussit pas. La salle resta vide. Des vendeurs de places offrirent aux passants, soit dans la rue, soit chez les marchands de vin, une masse de billets à vil prix. Balzac, dit-on, en vendit lui-même. La salle se remplit, grâce à ces moyens étranges. La représentation eut lieu, malgré les protestations et les huées. Si le principal interprète de la comédie n’avait pas crié, de toutes les forces de ses poumons, le nom de l’auteur, personne ne l’eût entendu.

Quant au drame de Vautrin, représenté à la Porte-Saint-Martin le 14 mars 1840, il fut dé-