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l’accepteront toujours, par l’appât de la richesse, et seront bientôt surpris en voyant que tout développement des hommes, quel qu’il soit, conduit toujours à la liberté ! »

Des politiciens voyaient dans l’argent un moyen de gouverner plus à l’aise, d’intéresser les riches aux intrigues de leur propre ambition, et avec eux de battre en brèche le libéralisme avancé, au lieu de lui préparer les voies du triomphe.

« Enrichissez-vous », « chacun chez soi », conseillaient-ils, afin de créer une diversion à la politique ; et, conséquemment, beaucoup de jeunes gens qui, suivant une vocation décidée pour l’étude, inclinaient vers les carrières donnant plus de gloire que de profit, se virent contrariés dans leurs goûts par leurs parents.

Cela s’est vu depuis un temps immémorial ; mais, après 1830, cela se vit plus généralement que jamais. « Enrichissez-vous » devint une sorte de devise opposée au romantisme, à l’amour de l’art, au républicanisme militant. On ne songea qu’à faire fortune, et rapidement.

Après la mort de mon excellente mère, en 1833, mon père résolut de me placer, bon gré mal gré, dans une maison de commerce, aux Deux Pierrots, magasin de nouveautés situé au coin de la rue de la Huchette, en face du petit pont de l’Hôtel-Dieu.