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logue en essayant d'accommoder Je génie grec au goût moderne et en substituant le gracieux au beau : le poëuie épique prit un Ion léfler; le dimi- nutif, venu de l'Italie, essaya de s'acclimater dans les œuvres les plus graves, ou bien lorsque les poètes voulurent rester fidèles aux maîtres de l'antiquité, ils ne surent être que roides et guindés, là où leurs modèles avaient été sublimes. La poésie, infidèle à sa mission véritable, cessa d être populaire, et devint le privilège exclusif de quelques lecteurs lettrés, seuls capables de comprendre les allusions à l'antiquité dont elle était remplie. Ronsard l'a dit en toutes lettres :

Les François qui mes vers liront, S'ils ne sont et Grecs et Romains, Au lieu de ce livre, ils n'auront Qu'un pesant i'aix entre les mains.

La poésie devint savante; le poëte n'eut pas à se préoccuper d'exprimer dans un langage élevé de grandes et nobles idées. Son but immédiat fut la traduction, l'imilation, en un mot le pastiche. Ronsard habilla Jupiter à la mode de la cour des Valois, comme au moyen âge on changeait en sta- tues de saints les chefs-d'œuvre de la statuaire an- tique, afin de les sauver de la destruction. On ne s'apercevait pas que la vie ne circulait plus à tia-