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de l'école primilive représeiileiil la Sainte Famille ; c'est encore la manière donl Joinville racoiile la vie de saint Louis. I.e premier caractère de celte qualité, c'est riiiconscience de l'auleur qui, loin de se douter qu'il est n;iïf, se croit en pleine possession de l'art. Elle peut donner du charme à la jioésie intime et ftunilière; mais elle est déplacée dnns Téglogue. Ce genre demande de la grâce et de l'élé- gance. Parce que Virgile peignait avec beaucoup de nuances les mœurs champêtres; parce qu'il en- trait dans le détail de la vie des bergers, Ronsard a cru qu'il était naïf; c'est une erreur profonde, il n'y a rien de naïf chez Virgile. Il y a entre lui et les auteurs naïfs la même différence qu'entre Ra- phaël et ses devanciers. Virgile, disant dans un vers admirable :

Incipc, parvc puer, lisii cognoscLTC inalicin,

et Raphaël peignant la Vierge à la chaise, obéissent à la même pensée; ils sont gracieux, ils ne sont pas naïfs.

C'est ce que ne conq)ren(l p.as Ronsard, et, pour rendre le chant de ses bergers « naïf, sans art et sans façon, » il a recours à des artitices qui tra- hissent à chaque instant ses efforts. C'est pour être naïf quil appelle (ju'se, Guisiu ; fju'il abuse de ces