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Lucie Thirache resta étourdie sous ces reproches, répétant :

— Ben, quoi ? Qu’est-ce que t’as ?

— Oui, oui, tu sais bien ce que j’ai. Et cette espèce d’abruti qui est là-haut dans ton lit ?

Alors Lucie, injuriée, se révolta :

— Abruti ! Il l’est moins que toi, abruti, pour sûr ! Et puis, d’abord, est-ce que je suis pas libre ? Ça te regarde pas. Et puis, t’as pas besoin de gueuler comme ça, pour ameuter le monde.

Soudain elle se radoucit, donna des raisons. Elle s’en fichait pas mal, elle, de son amant. Il pouvait bien la lâcher. Elle saurait en trouver d’autres ; des hommes, ça avait toujours besoin de femmes. Et, avec une désinvolture insouciante, elle ajouta :

— Et puis, tu sais, tant pis. Moi je m’embête, je veux m’amuser un peu. Si tu crois que c’est drôle de rester toujours seule. D’abord, j’ai besoin d’hommes ; vois-tu, ça m’a repris.

— Va rejoindre Charles.

— Et de l’argent ?

— Tu en prendras sur celui qu’ils ont laissé.

— Oui, je t’en flanque : n-i ni, c’est fini ! Il n’y en a plus. Tiens, je viens de changer la dernière pièce de cinq francs, il reste douze sous.

— Tu as tout payé au moins ?

— Mais non, tu es sotte ! Je l’ai dépensé, celui-là et puis d’autre encore. Depuis que tu es partie,