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romances, la photographie de Judic, un flacon coiffé de peau blanche.

L’absence de l’homme, l’indifférence de la fille pour cette chambre, où elle ne faisait que dormir, s’affichait jusque sur la toilette : des serviettes sales, une natte de cheveux hérissée d’épingles, une éponge s’y affaissaient.

Au fond, dominant ce désordre, le lit apparaissait à demi voilé sous des rideaux blancs, et, la tête enfouie dans la mollesse de l’oreiller, Lucie Thirache dormait, souriante, les bras étendus, la peau moite, les seins à l’air.

Doucement, Dosia se glissa près elle, puis tout à coup, avec une brusquerie espiègle, elle lui dit dans l’oreille : « Oh ! la grande fainéante ! »

Lucie, d’abord, eut seulement une moue renfrognée, elle souleva ses paupières lourdes et murmura : « C’est toi ? » puis elle referma les yeux, emmaillottant sa face dans les couvertures. Dosia la voyant prête à dormir encore, courut à une fenêtre, à l’autre, tira les rideaux, inonda la chambre de lumière. Et revenue vers le lit, elle prit à deux mains la tête de Lucie, se mit à l’embrasser très vite dans les cheveux, sur la bouche, sur le front. Bientôt son amie entrouvrit les yeux avec une grimace boudeuse ; et maintenant, la tête un peu relevée, les poings ramenés sur les sourcils, elle baillait.

— Oh ! comme je suis fatiguée !