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les plaintes des malades, ni les hurlements des filles soûles, vivre béatement, sans un souci. La guérison complète de son mal lui était accordée : la nourriture saine de l’Œuvre l’avait rétablie. Et puis plus de tracas d’argent, ne s’occuper à rien qu’à son salut, qu’à sa dévotion pour la très sainte Vierge, qui l’avait tirée de l’abîme du péché.

Et la salutation angélique, qu’on allait dire, confirma Lucie en ces pensées. Elle avait une profonde vénération pour la Mère de Dieu ; cette nature mystérieuse de mère, restée vierge, plongeait la fille dans une admiration respectueuse et étonnée. À Marie elle avait adressé ses premières prières si tôt suivies de la grâce. Elle lui en gardait une reconnaissance, la jugeant spécialement dévouée à son salut.

Avec une scrupuleuse attention qui pesait et méditait chaque mot, Lucie donna le répons de la salutation angélique : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs ! » Comme elle avait besoin de cette puissante intercession ! Elle avait si gravement offensé Jésus et si longtemps, qu’elle n’oserait l’implorer lui-même. Pendant cinq jours, elle avait oublié dire son chapelet. Et même la pénitence, imposée par son confesseur, avait été accomplie à demi. Malgré tout cela, elle n’avait pas craint de s’approcher à la Sainte-Table, en un désir cupide