Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/71

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Plus doctes, plus heureux dans leurs puissants efforts,
À tout nouveau Virgile ont ouvert des trésors.
Tous les arts sont unis : les sciences humaines
N’ont pu de leur empire étendre les domaines,
Sans agrandir aussi la carrière des vers.
Quel long travail pour eux a conquis l’univers !
Aux regards de Buffon, sans voile, sans obstacles,
La terre ouvrant son sein, ses ressorts, ses miracles,
Ses germes, ses coteaux, dépouille de Téthys ;
Les nuages épais, sur elle appesantis,
De ses noires vapeurs nourrissant leur tonnerre ;
Et l’hiver ennemi, pour envahir la terre,
Roi des antres du Nord, et, de glaces armés,
Ses pas usurpateurs sur nos monts imprimés ;
Et l’œil perçant du verre, en la vaste étendue,
Allant chercher ces feux qui fuyaient notre vue,
Aux changements prédits, immuables, fixés,
Que d’une plume d’or Bailly nous a tracés ;
Aux lois de Cassini les comètes fidèles ;
L’aimant, de nos vaisseaux seul dirigeant les ailes ;
Une Cybèle neuve et cent mondes divers
Aux yeux de nos Jasons sortis du sein des mers ;
Quel amas de tableaux, de sublimes images,
Naît de ces grands objets réservés à nos âges !
Sous ces bois étrangers qui couronnent ces monts,
Aux vallons de Cusco, dans ces antres profonds,
Si chers à la fortune et plus chers au génie,
Germent des mines d’or, de gloire et d’harmonie.
Pensez-vous, si Virgile ou l’aveugle divin
Renaissaient aujourd’hui, que leur savante main
Négligeât de saisir ces fécondes richesses,