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tibles, quand on lit dans les journaux des lettres signées Charles Villette[1], où l’on voit ce petit homme qui babille et remue sans cesse afin qu’on l’aperçoive, et qui se travaille à paraître avoir de l’esprit aux dépens de quiconque n’est pas en faveur à la cour des Jacques, ne faut-il pas être frappé d’un aveuglement profond pour méconnaître dans ce personnage le bouffon en titre dont les gambades faisaient rire les anciennes cours féodales, et qu’on appelait le fou du roi ?



VIII[2]

SUR LES FLATTEURS DU PEUPLE.


J’ai aussi, pour descendre à de moindres objets, visité tous nos spectacles ; et dans la plupart des nouveaux chefs-d’œuvre qui nous inondent, drames, chansons, pot-pourris, facéties, atrocités souterraines et monacales, j’ai reconnu, sinon le style et les talents, au moins l’esprit de flagornerie qui remplissait les comédies, opéras, ballets, dont Louis XIV, dit le Grand, s’enivrait sur ses théâtres de Versailles et de Marly. Les Naïades, les Neptunes, les Apollons de ces beaux ouvrages qui avaient soin de diriger tout cet encens poétique vers le monarque qui les payait, ne feraient aujourd’hui que changer de costume et

  1. Le marquis de Villette, un ci-devant grand seigneur, devenu le plus pétulant des Jacobins.
  2. Publié dans l’édition de 1840.