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Alors de l’univers ils forcent les hommages :
Tout, jusqu’à Plutus même, encense leurs images ;
Tout devient juste alors ; et le peuple et les grands,
Quand l’homme est respectable, honorent les talents.

Ainsi l’on vit les Grecs prôner d’un même zèle
La gloire d’Alexandre et la gloire d’Apelle ;
La main de Phidias créa des immortels,
Et Smyrne à son Homère éleva des autels.
Nous, amis, cependant, de qui la noble audace
Veut atteindre aux lauriers de l’antique Parnasse,
Au rang de ces grands noms nous pouvons être admis ;
Soyons cités comme eux entre les vrais amis
Qu’au-delà du trépas notre âme mutuelle
Vive et respire encor sur la lyre immortelle.
Que nos noms soient sacrés, que nos chants glorieux
Soient pour tous les amis un code précieux.
Qu’ils trouvent dans nos vers leur âme et leurs pensées ;
Qu’ils raniment encor nos muses éclipsées,
Et qu’en nous imitant ils s’attendent un jour
D’être chez leurs neveux imités à leur tour.


II[1]

À LE BRUN


 Laisse gronder le Rhin et ses flots destructeurs,
Muse ; va de Le Brun gourmander les lenteurs.

  1. Édition 1819.