Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/384

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ni pressant, ni timide avec délicatesse ;
La douce émotion n’agite plus son cœur,
Et son baiser rebute et n’a point de fraîcheur.
La troupe aux yeux charmants des trois sœurs ingénue
Qu’un même nœud relient dansantes, demi-nues,
Fuit un triste vieillard qui n’a que des regrets,
Et qui veut à la rose unir ses noirs cyprès.
Elles aiment à voir deux âmes enfantines
Se conter tour à tour leurs caresses divines ;
Deux visages brillants de jeunesse et d’amour
Se presser l’un sur l’autre à la fuite du jour ;
Deux jeunes seins se joindre et palpiter ensemble ;
Deux bouches de vingt ans, qu’un même feu rassemble,
Mêler leur douce haleine et leurs cris langoureux,
Leurs baisers dévorants, humides, savoureux.


Que tardes-tu donc ? Camille ne t’inspire-t-elle plus rien ? Camille !… dieux ! Camille !… ô déesse !… un de ces vieillards que vous ne pouvez souffrir, qui vous inspirent du dégoût, Camille l’a reçu dans son lit !… ingrate ! pour des présents tu m’as préféré un vieux !… Sed quascumque dedit vestes, quoscumgue smaragdos (Prop., lib. II, Eleg. xiii), que tous ces présents périssent, à l’aide desquels Barbarus excussis agitat vestigia lumbis… d’un lit qui fut à moi…


Dévoré de désirs que l’impuissance irrite.
....................
D’un lit qu’il déshonore inutile fardeau.


Mais moi je prendrai désormais une beauté plus fidèle pour objet de mes élégies.




Ah ! qu’ils portent ailleurs ces reproches austères,
D’une triste raison ces farouches conseils,