LXXIV[1]
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Je t’indique le fruit qui m’a rendu malade ;
Je te crie en quel lieu, sous la route, est caché
Un abîme, où déjà mes pas ont trébuché.
D’un mutuel amour combien doux est l’empire !
Heureux, et plus heureux que je ne saurais dire,
Deux cœurs qui ne font qu’un, dont la vie et l’amour
N’auront, dans un long temps, qu’un même dernier jour !
Mais bien peu, qu’ont séduits de si douces chimères,
Out fui le repentir et les larmes amères.
Ô poètes amants ! conseillers dangereux,
Qui vantez la douceur des tourments amoureux,
Votre miel déguisait de funestes breuvages ;
Sur les rochers d’Eubée, entourés de naufrages,
Allumant dans la nuit d’infidèles flambeaux,
Vous avez égaré mes crédules vaisseaux.
Mais que dis-je ? vos vers sont tout trempés de larmes.
Ce n’est pas vous qui m’avez perdu… Si je vous avais cru… (traduire[2].) C’est moi-même ; c’est elle et ses yeux… et sa blancheur… et ses artifices… et ma… et ma…
Ah ! tremble que ton âme à la sienne livrée
Ne s’en puisse arracher sans être déchirée.