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XLV[1]


Viens près d’elle au matin, quand le dieu du repos
Verse au mol oreiller de plus légers pavots,
Voir, sur sa couche encor du soleil ennemie,
Errer nonchalamment une main endormie ;
Ses yeux prêts à s’ouvrir, et sur son teint vermeil
Se reposer encor les ailes du sommeil.


XLVI[2]


Va, sonore habitant de la sombre vallée,
Vole, invisible écho, voix douce, pure, ailée,
Qui, tant que de Paris m’éloignent les beaux jours.
Aimes à répéter mes vers et mes amours.
Les cieux sont enflammés. Vole, dis à Camille
Que je l’attends, qu’ici, moi, dans ce bel asile,
Je l’attends ; qu’un berceau de platanes épais
La mène en cette grotte, où l’autre jour au frais,
Pour nous, s’il lui souvient, l’heure ne fut point lente…
Va. Sous la grotte, ici, parmi l’herbe odorante,
Dont l’œil même du jour ne saurait approcher.
Et qu’égaye, en courant, l’eau, fille du rocher…

  1. Édition 1819.
  2. Édition 1833.