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Qui s’élevaient au front de ses chevreuils sauvages
Par Diane frappés à travers ses ombrages.


Mais je ne sais quel vent froid nous vient de l’est et semble annoncer une tempête… Voilà un grain qui se forme.

Α. — Oh ! non… non…

Κ. — Pour moi, je ne peux point vanter ma patrie. Les dieux ont peu fait pour elle… Mycone n’a que des figues et des raisins… C’est un rocher aride… Mais c’est ma patrie… C’est là que j’ai ouvert les yeux pour la première fois… Là sont mes parents, ma famille… mes premiers amis… Je m’y retrouverai avec joie, je n’en sortirai plus, et je la préférerai à toutes les autres que j’ai vues, quoique plus belles. Mais voyez, la mer devient houleuse… je crains bien un orage…

Α, Β, Γ, Δ, (ensemble). — Ma patrie est la plus belle, etc.

Le pilote. — Paix ! quel bruit ! on ne s’entend pas. Est-ce le temps de disputer ? Voici une tempête terrible…

— Baisse la toile… prends ce câble… Je crois que tous les démons sont à cheval sur cette vague… Quel vent !… Voilà la voile en pièces…

Les voyageurs pleurent et gémissent. — Ah ! pourquoi ai-je quitté ma famille, etc.. Ah ! qu’avais-je à faire en tel lieu… Ah ! ne pouvais-je me passer des richesses de telle ou telle contrée, etc… Ô Jupiter de tel lieu ! Neptune Ténien, Apollon Délien, Junon Samienne (chacun le dieu de son pays).

Le pilote. — Paix donc !…

Les voyageurs. — Cent moutons… Mille brebis… Cent taureaux…

Ô dieux ! sauvez-nous !…

Le pilote. — quels cris ! vous nous rendez sourds et les dieux aussi… Simon, tire ce câble… Au lieu de crier, travaillez et aidez-nous… Voyez-les un peu qui disputent